ChatGPT, la nouvelle arme du e-commerce ?

Camille Basso
Camille Basso
January 18, 2024
6 min
ChatGPT, la nouvelle arme du e-commerce ?
SOMMAIRE

Dans le domaine du retail, les IA génératives comme ChatGPT pourraient faire croître les revenus des entreprises de 400 à 660 milliards de dollars par an selon une étude de McKinsey1. De fait, 45% des chefs d’entreprises ont révélé dans un sondage de Gartner que ChatGPT a accéléré leurs investissements en IA2. Présentée pour la première fois en novembre 2022 par Open AI, l’IA générative ChatGPT est rapidement devenue le sujet du moment. Mais dans quelles mesures ce “transformeur génératif pré-entraîné” pourrait-il contribuer au développement du e-commerce ?

Dans quelle mesure ChatGPT représente un atout pour l’e-commerce ?

Dans le domaine du e-commerce, ChatGPT peut avant tout se révéler pertinent pour le développement de produits, de services et de plateformes web. 

Analyse des données clients

Les compétences analytiques de ChatGPT peuvent être utilisées pour mieux comprendre des données client afin d’améliorer leur expérience. Les experts d’Insights Opinion3 ont notamment mis en avant que les compétences en langage naturel de ChatGPT révèlent des données qui auraient pu se perdre lors d’une analyse plus générale et, ainsi, fournissent des résultats plus pointus. Dans le cadre de l’e-commerce, ChatGPT peut être utilisé lors de sondages auprès des clients ou d’analyse du comportement des utilisateurs sur une plateforme. 

On peut imaginer par exemple de demander à un utilisateur de décrire en quelques lignes ses habitudes de consommation”, ajoute César Tonnoir, le CEO de Miam. “Si l’utilisateur écrit : “Nous sommes quatre à la maison dont deux enfants, nous ne dépensons jamais plus de 100€ par semaine en courses, et nous essayons de limiter notre consommation de viande tout en privilégiant le local”, ChatGPT sera à même d’appliquer automatiquement les bons tags au profil de consommation de l’utilisateur : nb_adultes = 2, nb_enfants = 2, panier_max = 100, score_viande = 0,3, score_local = 0,7… Et ce, sans demander à l’utilisateur de remplir un questionnaire rébarbatif et chronophage. Au-delà d’interagir naturellement avec le client, l’aptitude de ChatGPT à “lire entre les lignes” se révèle précieuse pour personnaliser plus finement une expérience e-commerce”. 

Rédaction de fiches produits et listes d’articles 

L’AI générative est un outil performant pour le développement des plateformes e-commerce. Certaines entreprises prennent appui sur ChatGPT dans le cadre de tâches difficiles ou répétitives pour l’humain. La compagnie Undiz, filiale du groupe Etam, fait notamment appel à cette IA générative pour la rédaction de ses fiches produits et listes d’articles4.

Développement des plateformes e-commerce

ChatGPT peut également assister les entreprises dans le développement technique de leur plateforme e-commerce5. Cet agent conversationnel a effectivement la possibilité de générer des lignes de codes pour les développeurs, de recommander des outils techniques et des ressources, d’expliquer le fonctionnement de logiciels spécifiques, d’aider à débloquer des problèmes techniques, etc. 

Création de contenus

L'une des principales fonctionnalités de ChatGPT est, évidemment, sa capacité à générer du contenu textuel. Depuis plusieurs mois, certaines entreprises utilisent notamment des agents conversationnels comme ChatGPT pour la création d’email marketings et de newsletters. C’est le cas de Salesforce, comme le relevait un article de CNBC en mars dernier6. De même, l’intelligence artificielle générative de ChatGPT permet de créer des visuels publicitaires pour les entreprises. C’est par exemple le cas de Carrefour, qui a sollicité ChatGPT pour créer des vidéos promotionnelles7. Dans celles-ci, un avatar conçu par l’enseigne explique les avantages de faire ses courses auprès du distributeur. Enfin, ChatGPT peut évidemment créer des articles et pages de blog pour les entreprises8, afin de produire du contenu marketing pertinent. 

"L’intelligence artificielle ne peut pas être utilisée [dans un chatbot] sans que nous nous assurions de son authenticité : du fait qu’elle n’hallucine pas et ne devienne pas dangereuse", Nico Beukes.

Quelles sont les limites de ChatGPT ? 

Véritable atout pour certains, ChatGPT présente toutefois plusieurs limites dans ses fonctionnalités. 

L’une d’entre elles, comme l’a relevé la spécialiste du numérique Laurence Devillers pour Le Monde, est le risque de désinformation9. En effet, l’IA générative peut apporter de véritables réponses aux requêtes des utilisateurs… comme en inventer de toutes pièces. Or, ces “fake news”, ou “hallucinations” sont parfois très crédibles et peuvent aisément tromper un internaute. De plus, si l’on ne lui signale pas son erreur, ChatGPT peut se nourrir de ces nouvelles données artificielles afin de répondre aux requêtes d’autres utilisateurs, qui risquent à leur tour de les juger crédibles. Cela engendre ainsi un cercle vicieux de désinformation, au sein même de son système.

Dans le cas d’une expérience e-commerce alimentaire, l’enseigne qui recommande des produits ou des repas à un consommateur porte une responsabilité particulière. On peut imaginer un cas où ChatGPT générerait une recette de cuisine immangeable ou dangereuse (sans prendre en compte les allergènes ou l’équilibre des aliments, par exemple)”, détaille César Tonnoir. 

De même, un article du Forbes remarque que l’agent conversationnel n’est pas toujours optimisé pour répondre à des requêtes humaines. ChatGPT rencontre notamment des difficultés dans la compréhension du contexte d’une demande, tant au niveau de sa formulation que de sa nature10. De plus, l’IA générative peine à répondre à des requêtes multiples, car il ne sait pas naturellement les prioriser. Cela mène ainsi à une diminution de son efficacité et de la pertinence de ses réponses. Dans le cadre d’une requête ayant plusieurs spécificités, ChatGPT se révèle donc moins performant. Enfin, l’IA générative rencontre des difficultés lorsqu’elle doit traiter de sujets spécifiques, car ses connaissances sont relativement limitées. Dans le cas de demandes trop précises ou de sujets peu répandus sur le net, ChatGPT n’est donc pas un outil efficace pour ses utilisateurs.

Comment se traduiraient ces limites dans l’e-commerce ?

Dans le cadre du e-commerce, ChatGPT peut présenter plusieurs problèmes lorsqu’il est confronté directement à des clients.

Mauvaise compréhension des requêtes 

Agent conversationnel présentant nombre d’avantages, ChatGPT peut participer activement à l’accompagnement des clients sur les sites e-commerce. 

En France, l’enseigne Carrefour à immédiatement pris le pas de cette innovation en intégrant ChatGPT à son site e-commerce. Sous le nom Hopla, le chatbot conseille et accompagne les clients dans leur parcours d’achat sur le Drive11. Malheureusement, les difficultés que rencontre ChatGPT pour le moment se révèlent également dans ce cas d’usage. En effet, les experts en commerce de détail de LSA ont testé cette fonctionnalité et détaillé “[qu’il] reste des progrès à faire sur la compréhension des requêtes et la précision des recommandations12. Cependant, Hopla n’est présent sur le site de Carrefour que depuis juin 2023 et présage d’améliorer ses aptitudes prédictives au fil de ses échanges avec des clients de l’enseigne.

En Asie du Sud-Est, la plateforme de e-commerce Lazada, qui propose des produits grand public, a également intégré un chatbot alimenté par ChatGPT, LazzieChat. Présenté comme un assistant idéal pour les clients achetant des vêtements et produits de beauté, LazzieChat rencontre des difficultés. C’est d’ailleurs ce qu’a relevé l’entreprise Lazada elle-même auprès des journalistes de The Paypers13. Néanmoins, le marketplace asiatique assure être en constante amélioration du service et espère le rendre de plus en plus performant. 

"L'IA générative est par définition tributaire du "prompt". Néanmoins, elle est et sera pour notre activité un outil puissant, extrêmement prometteur et aux cas d'usages multiples", César Tonnoir.

Une mésinformation dans les échanges SAV ? 

Comme l’ont remarqué plusieurs experts et journalistes, ChatGPT n’apporte pas toujours des réponses fiables aux requêtes de ses utilisateurs. 

Récemment, la plateforme de communication client Intercom a intégré ChatGPT à son nouveau système de chatbot, Fin. Selon Fergal Reid, le Directeur du Machine Learning chez Intercom, cette nouvelle fonctionnalité est un outil performant, mais perfectible14. “Nous devons porter une attention particulière à la capacité de Fin à communiquer de manière humaine, mais aussi d’éviter qu’il mésinforme les clients ou génère des hallucinations (NDLR : informations inventées par ChatGPT)”. 

Depuis mai dernier, l’entreprise de marketing et de recherche Yext utilise également ChatGPT dans son chatbot de service client. Cependant, le directeur de Yext, Nico Beukes, insiste sur la nécessité d’un contrôle humain derrière de telles technologies. “L’intelligence artificielle ne peut pas être utilisée [dans un chatbot] sans que nous nous assurions de son authenticité : du fait qu’elle n’hallucine pas et ne devienne pas dangereuse.” Dans le cadre de chatbot de SAV pour l’e-commerce, ChatGPT requiert donc une surveillance constante afin de ne pas proposer des solutions inexistantes aux clients ou de les mésinformer quant aux spécificités de certains produits et services.

Le risque de bulles de filtre

L’une des limites de ChatGPT est la définition de la base de données sur laquelle il s’appuie. Comme le met en évidence le Forbes, ses réponses peuvent donc contenir “des biais et des préjugés”, soit être biaisées et discriminatoires10. De fait, ses utilisateurs risquent d’être plus facilement enfermés dans des “bulles de filtre”. Ce concept, amené par Eli Pariser en 2010, consiste à confronter les internautes uniquement à un contenu qui leur plaît ou qui correspond à des données définies par un système spécifique (IA générative, moteur de recommandation, etc)15. Un article de l’Index de Censure détaille notamment que “cela limite l’exposition des utilisateurs à différentes perspectives et a un impact sur leur esprit critique16”. 

C’est pourquoi, sur les réseaux sociaux, les algorithmes intègrent désormais un certain pourcentage de recommandation aléatoire destiné à confronter les internautes à des contenus qu’ils ne connaissent pas ou ne sont pas susceptibles d’apprécier. Cependant, ChatGPT ne présente pour le moment pas de telle fonctionnalité. Cette IA générative peut donc contrôler les informations qu’elle fournit à ses utilisateurs, limiter le type de contenu auxquels ils ont accès et réduire l’échange des idées. Dans le cadre du e-commerce, le risque de réduire le champ de possibilités et le choix des consommateurs est donc accru. En effet, ChatGPT pourrait être entraîné à limiter les produits ou services qu’il recommande et, de fait, ne pas réellement donner le libre choix aux utilisateurs des achats qu’ils font. 

Conclusion

A l'instar du machine learning, l'IA générative n'est pas magique. Il y a certains cas d'usages où sa pertinence reste encore limitée, par exemple pour inspirer un consommateur alors même qu'il ne sait pas encore ce qu'il cherche. En d'autres termes, l'IA générative est par définition tributaire du "prompt". Néanmoins, elle est et sera pour notre activité un outil puissant, extrêmement prometteur et aux cas d'usages multiples, sur lesquels nous travaillons déjà”, conclut César Tonnoir.

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